n° 106  

Cyber-Président

Par Valéry Chartier |

« La Start‑up Nation c’est le dépassement des clivages, la fin de l’Histoire, la fin des idéologies. Le progrès sera technologique ou ne sera pas ! » Alors que le monde bascule dans une nouvelle ère, pour Emmanuel Macron, il n’y aura de révolution que numérique. « Tu peux augmenter la durée de cotisation, du moment que tu ne touches pas au débit ! »


Retraite (d’intelligence) artificielle

« Qu’on ne vienne pas me dire que cette loi est de droite : elle a été entièrement rédigée par une intelligence artificielle ! » Emmanuel Macron s’est défendu de toute idéologie quant à la réforme des retraites, puisqu’il a confié son architecture à un robot. « Un robot n’est ni de droite ni de gauche. Il est pragmatique et efficace. »

Une méthode qui va mettre fin aux contestations stériles et aux grèves ineptes. « Roger avec sa banderole, qu’il commence par battre DeepBlue aux échecs, et après il viendra nous présenter ses idées géniales sur les retraites ! » échec et mat pour les syndicats. « Ça va mille fois plus vite, c’est mille fois moins cher, et ça donne les mêmes résultats que McKinsey, c’est dire si c’est juste ! » Alors que l’inquiétude commence à poindre à l’ENA et dans les cabinets de conseil, Emmanuel Macron a rappelé qu’on aurait malgré tout toujours besoin des petites mains de la République. « Vous êtes les garants, les garde‑fous du système à la française. On ne laissera pas un robot beuguer et s’attaquer aux dividendes ! »

Remaniement artificiel

« Bruno Le Maire, il porte bien le col roulé, mais c’est quoi sa plus‑value ? » Agacé par la médiocrité de son gouvernement, Emmanuel Macron a agité la menace d’un vaste remaniement. Et envisage de remplacer ses ministres par des intelligences artificielles. « Je ne suis pas certain qu’un robot aura moins d’empathie qu’Élisabeth Borne. Il sera en tout cas plus facile de lui apprendre à faire semblant. »
Pour l’affirmer, le Président peut s’appuyer sur de solides certitudes. « On ne part pas à l’aventure, ça fait cinq ans qu’on est en phase de test avec chatGabriel ». Emmanuel Macron a en effet profité de cette occasion pour révéler que Gabriel Attal était en réalité une intelligence artificielle : « Un robinet d’eau tiède, un charisme d’huître, et aucune conviction : le prototype coche toutes les cases. » Un ministre 3.0 qui a acquis à vitesse grand V le catéchisme ultra‑libéral. « Reste simplement quelques ajustements à effectuer pour qu’il ait une voix moins agaçante. »
Seule difficulté, le ministère de l’Intérieur, où le processus semble plus compliqué. « On ne va pas se mentir, pour certains parmi les forces de l’ordre, le concept d’intelligence, même artificielle, pose problème. » Les concepteurs du logiciel gouvernemental ont donc imaginé une version beta, implémentée à partir de la base de données de CNews. Et les résultats sont probants pour le progiciel HanounAI. «  Il insulte les gauchistes, les écolos et les immigrés, il lèche les milliardaires. Le cahier des charges est rempli. » Même s’il n’est pas à l’abri de dérapages incontrôlés, et le Président l’admet d’ailleurs volontiers en petit comité : « Les nouilles dans le slip, c’est moyen. »

Pédagogie artificielle

« Il faut arrêter de perdre son temps à expliquer la réforme des retraites. Si la pédagogie ça marchait, ils n’auraient pas arrêté l’école en 3e pour devenir caristes. » Emmanuel Macron en a marre qu’on prenne les Français pour plus intelligents qu’ils ne sont. « Dans les médias, la seule personne que vous risquez de convaincre c’est Léa Salamé, et encore elle est capable de réclamer 67 ans. »

Emmanuel Macron a donc fixé une ligne claire : « Ce n’est pas aux Français qu’il faut parler, mais aux algorithmes de Twitter, Facebook ou TikTok. » Le Président veut ainsi mettre en place à l’Élysée une cellule web chargée d’inonder les réseaux sociaux. « Quand les gens auront vu et revu des vidéos d’agents RATP qui partent en retraite à 35 ans pour assouvir leurs instincts pédophiles et satanistes, je ne donne pas cher de la peau des régimes spéciaux. Ça va devenir antisystème de partir à 64 ans ! »
Restait à trouver des figures de proue médiatiques. « On va muscler notre jeu et créer une Dream Team d’influenceurs ! » Jacques Attali, Alain Minc, Alain Finkielkraut, Michel Drucker… tous participeront à cette nouvelle tournée Stars 80, avec leurs plus grands hits de Vive la crise à La mondialisation heureuse. Avec un refrain : « La pénibilité c’est toujours relatif ! »