« J’étais intrigué, curieux de voir ce qu’il y avait derrière un film comme ça. J’ai laissé mon contact à Vincent, Magalie m’a rappelé, et voilà. »
L’exploité du mois : Hugo, l'exploité Peter Pan

Pour Hugo, ça a commencé comme beaucoup d’autres : une séance de Merci Patron ! il y a cinq ans avec ses potes, et le voilà qui passe la tête, donne un coup de main pour les colis, les envois, monter un stand, et surtout débloquer un bug informatique – sa grande spécialité. Mais bien vite, c’est lui qui nous a intrigués, sa grande silhouette fine, ses cheveux longs, jamais un mot plus haut que l’autre, comme s’il voulait se fondre dans le décor. Qu’il se raconte, un peu… « Ma grand‑mère avait bossé dans le textile chez Saint‑Frère pendant trente ans, je viens d’à côté de Flixecourt, deux oncles chez Goodyear… Merci Patron !, du coup, ça m’a parlé. J’avais d’ailleurs commencé des études de sociologie après l’informatique, parce qu’il me manquait quelque chose, côté sciences humaines, philo, tout ça. J’ai arrêté quand j’ai compris que c’était comme ailleurs : il fallait avant tout performer. » On touche là un point sensible. « Ma scolarité n’a jamais été un long fleuve tranquille. On me répondait toujours ‘‘C’est le programme, fais-le, tu comprendras plus tard’’. C’était frustrant : je n’avais jamais de réponse à mes questions. Le système te pousse vers des études et un métier en te disant que ce sera cool, on te donne des responsabilités, puis on te flingue. Alors pour moi, ça a toujours été des choix par défaut : comment subir le moins possible les affres du marché du travail. L’informatique, on te dit qu’y aura du boulot dedans, alors tu y vas. Avec le recul c’est complètement stupide. »
Entre deux coups de main pour Fakir, il bosse dans une boite d’informatique, du coup. Mais y a autre chose, de plus profond, dans son rapport aux écrans, qui éclaire pas mal de choses. « Pour être honnête… Ma mère va décéder quand j’ai 13 ans. J’étais en 6e. Des choses me sont devenues pénibles : le monde des adultes, devenir grand, tout ça, j’en avais pas envie. Avec un père plutôt absent, parce que pris lui aussi dans cette logique capitaliste qui te presse, ben, pour un gamin de cet âge‑là, les jeux vidéo, c’est royal. On reste devant un écran pour se niquer le cerveau, et ça devient une addiction. C’est toujours le cas aujourd’hui, d’ailleurs, dans une moindre mesure. » Hugo a traversé ainsi les quinze dernières années – il a 27 piges, aujourd’hui. « J’aurais bien envie de changer de voie, mais si j’enlève l’informatique, je mets quoi à la place ? Alors, je reste où je suis. »
Avec un petit goût d’autre chose quand il pousse la porte de Fakir, tout de même. « C’est une somme de petits bonheurs récurrents : tenir une table, monter un stand. Boire un café avec Magalie, Fabien ou Pascale quand je passe, discuter de tout, de politique, dans un cadre convivial et où je suis à l’aise. Je suis pas un mec super investi en général, mais là oui : voir comment tout ça va évoluer, ça me plaît. » Ça nous plaît aussi, des Hugo dans l’équipe des bénévoles !