« Je ne suis pas le président des riches... »
Le 10 décembre dernier, lors de son émission sur TF1, Emmanuel Macron a – nous dit la presse – « vigoureusement rejeté l’image d’un président des riches » :
« Je n’ai jamais été ça... Mes valeurs ne sont pas celles d’un président des riches... »
Et pour se défaire de cette « caricature », il insistait : « Je sais d’où je viens. Je viens d’une famille, à Amiens, de médecins hospitaliers, d’une grand‑mère enseignante… »
Les faits sont là, pourtant.
Et ils sont têtus.
L'éternel Président des riches

Redistribution à l’envers
L’Institut des Politiques Publiques a évalué « l’impact redistributif de l’ensemble des réformes socio‑fiscales pérennes du quinquennat »
Et donc ? « Les plus riches en sont les grands gagnants car certaines réformes mises en place durant le quinquennat d’Emmanuel Macron les ciblaient particulièrement. » Comme le précise le magazine Challenges : « Le 1% des plus aisés ont le plus profité des années Macron, avec une hausse de 2,8 % de leur niveau de vie, soit un gain annuel de 3 500 euros. Et la hausse atteint même 4,1% pour le top 0,1% des Français. Cet enrichissement provient principalement de la suppression de l’ISF, pour un montant de 3,1 milliards d’euros, ainsi que de l’instauration du prélèvement forfaitaire unique (1,8 milliard), qui a adouci la fiscalité sur les revenus du capital. » « Une part croissante des revenus des foyers les plus aisés est constituée de revenu du capital », soulignait d’ailleurs France Stratégie, mi‑octobre, en relevant la forte hausse des dividendes versés. Et Challenges de conclure : « Il en ressort que les 1% les plus riches sont ceux qui ont vu leur niveau de vie grimper le plus fortement. Lorsque l’on regarde les montants bruts en euros, ils ont même gagné dix à vingt fois plus que les bas revenus ! »
Car pour les plus modestes, en effet, « en‑dessous de 800 euros mensuels, la politique d’Emmanuel Macron a été pénalisante. » « Les ménages les plus modestes ont nettement pâti de la hausse de la fiscalité sur l’énergie et le tabac, qui pèsent davantage en proportion de leur revenu », rappelle Chloé Lallemand, chercheuse à l’IPP et co-autrice de l’étude. Macron est bel et bien un Robin des bois à l’envers, qui prend aux pauvres pour donner aux riches. Aux uns, on supprime les emplois aidés. Aux autres, l’impôt de solidarité sur la fortune. Aux uns, on baisse les aides au logement. Aux autres, les taxes sur les dividendes, etc.
Mais ce graphique, ces données, n’offrent qu’une version adoucie, édulcorée, du scandale.
500 fortunes et 10 familles
Le magazine Challenges effectue, chaque année, depuis 1996, le classement des « 500 fortunes françaises ». Il y a vingt‑cinq ans, donc, le patrimoine de ces grandes familles équivalait à 6 % du Produit intérieur brut français. En 2017, à l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir, ces 500 s’élevaient déjà à 20 % du PIB. Après une année de macronisme, en 2018, leur score grimpait à 25%. à 30 % en 2019. à 43% ‑ on y reviendra ‑, après la crise Covid.
Derrière ces pourcentages, ce sont des centaines de milliards, et même des milliers de milliards, qui sont passés entre les mains d’une poignée de fortunés. C’est un pillage du pays qui est décrit ici.
Challenges, toujours, fait ce « constat dérangeant » : « Après dix‑huit mois de pandémie, alors que le pays sort d’un choc économique majeur qui a fait reculer de 8% son PIB, les écarts se sont accentués à l’intérieur même de ce 26e classement, entre la moyenne des "500" et les tout premiers. Aujourd’hui, la fortune des 10 Français les plus riches est supérieure de presque 100 milliards à celle des 490 autres grandes fortunes françaises. Bernard Arnault, numéro un de notre classement, symbolise cet écart : son patrimoine a progressé de plus de 55 milliards en un an, pour atteindre 157 milliards. » Chez nos 500 fortunes, au final, la richesse a donc progressé de 30%...
Comment l’expliquer ?
Que se passait‑il, dans la durée, bien avant Macron ? C’est un théorème économique, dit de Heckscher‑Ohlin : « À l’ouverture internationale répond une inégalisation interne des économies ». Grâce à la mondialisation, l’échelle des revenus s’allonge par les deux bouts : le plancher s’affaisse lentement ‑ tandis que le plafond est sans cesse crevé.
La France d’en bas est ainsi invitée, pour rester « compétitive », à regarder vers le monde d’en bas – vers la Slovaquie, la Roumanie, la Pologne, voire l’Inde ou la Chine. Tandis que la France d’en haut regarde, elle, vers le monde d’en haut, et notamment vers les USA.
Voilà la dynamique qui est engagée depuis les années 80, depuis quarante ans d’ouverture des échanges. Voilà sur quelle pente nous roulons. Les deux plateaux de la balance sont toujours plus déséquilibrés.
Quel est le rôle du politique, alors ?
Ce devrait être – je le crois – d’entraver, d’atténuer cette mondialisation, de maintenir des protections. Mais à défaut, au moins, le minimum : de rétablir, par l’impôt, un peu d’équilibre, de justice, dans cette balance.
Mais que fait à l’inverse Macron, depuis cinq ans ? Il déséquilibre un peu plus la balance ! Comme si le marché, les multinationales, le libre‑échange, etc., comme si toutes les forces économiques de la mondialisation n’y suffisaient pas, le président de la République y met en plus tout le poids de l’état. Pour accentuer l’injustice. Pour aggraver l’inégalité.
L’effet Covid
« Est‑ce qu’il y a, là, avec le Covid, un moment où la conscience sociale a grandi ?
— J’ai vu les injustices qu’il y a dans notre pays, confie avec émotion Emmanuel Macron. Je crois que cette période nous a tous changés. Sans doute que je suis plus sensible à d’autres choses que je ne l’étais avant… »
Malgré ce ton guimauve, qu’a fait le chef de l’état durant deux ans de confinement, déconfinement, re‑confinement ? Loin de lutter contre ces « injustices », sous couvert de Covid, il les a renforcées.
Ce chiffre, d’abord, hallucinant : en douze mois de crise sanitaire, de combien a augmenté la fortune des milliardaires français ? + 68 %. Plus 68 % en un an. Soit trois cents milliards d’euros. 300 000 000 000 €. L’équivalent, grosso modo, on n’est pas à quelques centimes près, de toute la richesse produite par la région Auvergne‑Rhône Alpes, ou des Hauts‑de‑France (même si je reste picard) plus la région Grand‑Est, en douze mois. Le fruit du travail de chaque salarié, chaque ouvrier, infirmière, banquier, professeur, agent d’entretien partis dans les poches des plus fortunés…
Face à cette orgie d’argent, un himalaya d’euros, le gouvernement a‑t‑il proposé, un seul instant, un impôt sur les « profiteurs de crises » ? Une taxe spéciale Amazon, Netflix, Uber, et autres plateformes ? Rien. Aucune. Il a laissé faire.
À l’étranger, pourtant, plusieurs pays (peu suspects de connivences marxistes) ont pris des mesures, rapides, claires et tranchées. L’Argentine adopte ainsi une « taxe ISF » sur les 2 % les plus riches de sa population, qui rapportera plus de 3 milliards. La Russie annonce durant l’été 2020 une hausse de 2 points des impôts sur les hauts revenus. L’Espagne cumule : hausse des contributions pour les 0,17 % de contribuables les plus fortunés, hausse de la taxe sur les sociétés immobilières cotées en bourse, fin des exonérations sur les dividendes… Même les états‑Unis, avec Joe Biden, s’y résolvent, en faisant passer l’impôt sur la fortune de 21 à 28%.
C’est que les institutions internationales elles‑mêmes les en conjuraient : « J’exhorte les gouvernements à envisager une solidarité ou un impôt sur la fortune pour ceux qui ont profité de la pandémie, afin de réduire les inégalités extrêmes », implorait Antonio Guterres, le secrétaire général de l’Onu. Et même Vitor Gaspar, économiste au FMI : « Les gouvernements devraient envisager des impôts plus élevés pour les ménages les plus aisés et les entreprises très rentables. »
Mais Macron est bien sûr resté sourd à ces recommandations.
Et encore 20 milliards…
Face à ces exemples, qu’allait faire le président français, lui d’habitude si prompt à citer les politiques étrangères en modèle ?
Rien. Laisser faire, encore et toujours.
Mais il y a mieux. Il y a pire. Au cœur de la crise Covid, quelle décision prenait Emmanuel Macron ? De baisser les impôts dits « de production ». Et l’impôt sur les sociétés. Pour un coût de 20 milliards sur deux ans, soit 38 % du plan de relance. Des mesures pérennes qui seront maintenues dans la durée : c’est 10 milliards chaque année. Des mesures qui, aux deux tiers, vont bénéficier aux grands groupes, et aux entreprises « de taille intermédiaire » : plus de 250 salariés. Un quart bénéficie même à seulement 280 grosses entreprises. Des mesures qui n’ont aucun lien, mais alors aucun, avec la crise économique. La preuve par le graphique ci-dessous, fourni par l’Institut des politiques publiques.
Que signifie‑t‑il ? En bas, en abscisse, les sociétés classées selon leur perte de chiffres d’affaires pendant le Covid. à gauche, en ordonnée, l’importance des baisses d’impôts. Eh bien, ce sont les entreprises les moins touchées par la crise qui vont le plus en bénéficier !
Et d’autres chercheurs, de l’OFCE, l’Observatoire français des conjonctures économiques, complètent : « Ces mesures, dans un contexte de forte incertitude, seront peu efficaces pour redynamiser l’investissement à court terme. » En clair : la richesse engendrée par cette mesure sera trois fois moins élevée que le coût pour les finances publiques. Alors que, d’après eux, l’efficacité serait cinq fois plus forte si l’« impulsion » était donnée sur « la demande » (les salariés, les étudiants, les plus modestes) que sur l’« offre » (les aides, qui plus est non ciblées, aux entreprises). Emmanuel Macron est bien le « président des riches ». C’est objectivé. Calculé. Prouvé.
Dans le même entretien, juste après son « jamais je n’ai été ça », lui se présente, au contraire, comme le garant de « l’intérêt général ». Mais c’est le discours, évidemment, des dominants depuis toujours : que « l’intérêt général » se confonde avec leurs intérêts, que l’un masque l’autre. Des millions pour les pauvres, « un pognon de dingue », c’est du gâchis. Des milliards pour les riches, c’est investir, les « premiers de cordée » venant tirer le reste de la société. Ou, au contraire, s’échappant par le haut.
Macron, le groom qui renvoie l’ascenseur
« Président des riches », Emmanuel Macron l’était déjà, dès 2017, comme candidat. Car pendant la campagne, qui l’a financé ? Et quel fut son premier combat ? Séduire les patrons des médias. Une fois élu, il ne l’a pas oublié…
2004
Il sort de l’ENA et entre à l’Inspection des Finances. Il y devient le protégé de Jean‑Pierre Jouyet, qui dirige alors l’institution. Jouyet le présente à Attali.
2007
Sous Sarkozy, Macron est rapporteur de la Commission Attali « pour la libération de la croissance française », au milieu de la crème du CAC 40 : Claude Bébéar d’Axa, Anne Lauvergeon d’Areva, Peter Brabeck de Nestlé, Serge Weinberg d’Accor et bientôt de Sanofi. Parmi les mesures préconisées : baisse des cotisations sociales, hausse de la CSG et de la TVA, l’instauration de « fonds de pension à la française », la réduction de la fiscalité sur la finance.
Ce qu’il y fait : Macron va plus loin que la commission : il met sur la table un sujet hautement explosif politiquement, la suppression de l’impôt sur la fortune.
2008
Il se met en réserve de la fonction publique, et devient banquier d’affaires chez Rothschild, suivant les conseils de ses mentors de la commission Attali, Weinberg ou Minc, qui l’enjoignent de s’enrichir avant d’entrer en politique. La banque le recrute pour son carnet d’adresses déjà étoffé. Il se place comme intermédiaire dans les mariages entre grandes entreprises : Atos, Pfizer, Lagardère...
Ce qu’il y fait : « On est comme une sorte de prostituée, confie‑t‑il au Wall Street Journal. Le job, c’est de séduire. » Il en sort avec 2,9 millions d’euros, un siècle de Smic environ.
2012
Il suit le programme des "Young leaders" de la French American Foundation, réservé aux jeunes « à fort potentiel de leadership et appelés à jouer un rôle important dans leur pays et dans les relations franco‑américaines ». Deux années de séminaire pour assurer, chez nos dirigeants, un conformisme de la pensée : atlantiste, mondialiste, libre‑échangiste.
Ce qu’il y fait : il remplit son carnet d’adresses.
2012
Toujours chez les Young Leaders, Emmanuel Macron coordonne le programme du candidat François Hollande. Une fois Hollande élu, il est nommé secrétaire général adjoint de la présidence de la République.
Ce qu’il y fait : Il conceptualise et pousse le CICE, le Crédit impôt compétitivité emploi, qui sera voté dès les premiers mois du quinquennat Hollande : un cadeau de 22 milliards d’euros par an aux entreprises, en particulier les plus grandes. Des rapports de France stratégie, organisme rattaché au Premier ministre, pointent régulièrement son inutilité – entre aucun et 100 000 emplois créés.
2014
Macron est invité au Bilderberg : le club le plus fermé et secret au monde, où sont conviés chaque année les futurs leaders politiques, prometteurs ou pressentis, triés sur le volet. Ils y croisent dirigeants de multinationales, chefs d’état, ministres, patrons de banque, universitaires, et même agents secrets. Une courroie de transmission, une de plus, pour diffuser la même pensée, atlantiste, mondialiste, libre‑échangiste.
Ce qu’il y fait : Macron, alors secrétaire général adjoint de l’élysée prend la parole pour tirer à boulets rouges sur François Hollande et sa politique. Mais le secret sera bien gardé. En parallèle, il gonfle encore son carnet d’adresses, entre grands patrons et ministres en exercice.
2014
Juste après le Bilderberg, Macron... est nommé à Bercy. Il y ouvre la porte plus grand encore au travail dominical, dérégule certaines professions réglementées, ou ravale les prud’hommes. Pour un résultat « infinitésimal », selon les économistes.
Ce qu’il y fait : Il commence à préparer sa campagne présidentielle, surtout. Pendant que meurent des entreprises comme écopla, victimes de son désintérêt.
Donnez, donnez, donnez… le Président vous le rendra
« Chez moi, on ne vit pas du contribuable ! »
Il l’assurait, bravache, le candidat Macron, avant son élection.
« J’ai créé un mouvement sans aucune subvention publique ! » Il faut dire qu’il n’en avait guère besoin : la haute finance, dès le départ, le soutenait…
Un monde de la finance, et de très riches contributeurs comme soutiens essentiels d’Emmanuel Macron en 2017 : c’est ce que révèle l’analyse des quelque 75 000 dons reçus par le parti en Marche dans le cadre de la campagne. Et cet « inventaire dessine une carte des réseaux macronistes qui ne dissipe pas ‑ c’est peu dire ‑ l’impression d’un Président choisi par la "France d’en haut" », selon le JDD (1er décembre 2018). Dans le détail, près de la moitié de la somme finale, a été versée par 1 %, à peine plus, des donateurs. Pour un don moyen, chez ces 1%, de 6 888 euros. Et encore : parce qu’un don à un parti est plafonné à 7500 euros, pendant une campagne.
Voilà les chiffres pour les donateurs français. Mais le plus intéressant vient sans doute de l’étranger : on s’aperçoit en effet que ce sont surtout les exilés (fiscaux ou pas) qui se sont mobilisés pour le candidat Macron. Ce fut le cas outre‑Manche ou de l’autre côté des Alpes, par exemple. Avec une donnée étonnante, que révèle le média la Lettre A, revue de référence dans le monde des affaires : la City de Londres, à elle seule, avec quelque 872 000 euros de dons à En Marche !, a plus contribué à la campagne d’Emmanuel Macron que les dix plus grandes villes françaises hors Paris. Idem pour les sommes arrivées de Suisse : 130 000 euros versés par les ressortissants installés dans le paradis fiscal, c’est 50 % de plus que Marseille, la deuxième ville française. « J’étais invité à un dîner de fundraising, nous raconte un avocat. Emmanuel Macron martelait ça : ‘‘Je vais supprimer l’ISF !’’ » Il faut croire que le message est bien passé.
Quelles conséquences ? Et quelles conclusions en tirer ?
Les explications, d’abord : « Le financement des partis politiques a toujours été un phénomène de classe : ce sont principalement les plus riches qui financent les campagnes politiques » explique Julia Cagé, économiste et professeur à Sciences Po Paris, auteure du livre Le prix de la démocratie (Fayard, 2018). « Les plus modestes donnent moins par manque de ressources. Oui, Emmanuel Macron a principalement fait campagne auprès des Français les plus riches et tout particulièrement des Parisiens. Et ce sont les mêmes qui l’ont financé. » Se pose, ici, la question du renvoi d’ascenseur : « Vous allez m’aider ? Vous n’aurez pas à le regretter. »
De fait, « Emmanuel Macron a mis en place une politique qui correspond à leurs intérêts [des plus riches] », poursuit Julia Cagé. « Ce qui a eu un impact direct sur les décisions qu’il a prises, notamment fiscales. Il a fait des cadeaux fiscaux aux personnes les plus aisées et a instauré le prélèvement forfaitaire unique sur le capital. Or après avoir dépensé de tels montants pour les plus favorisés, l’état n’en a plus pour la majorité des citoyens, il a donc diminué les APL, gelé un certain nombre de prestations sociales, reporté l’exonération de la taxe d’habitation, etc. »
Mais ses financeurs en ont eu, au moins, pour leur argent. Leur investissement leur aura été profitable…
Quand le CAC40 récupère la mise à l’Élysée
Été 2017 : il n’aura pas fallu longtemps pour que les financeurs de Macron s’invitent à l’élysée pour lui rappeler qui l’avait fait roi…
« Adoptée en 2018, la réforme devait initialement entrer en vigueur en 2019. Une réunion secrète avec des patrons du CAC 40, organisée à l’Élysée durant l’été 2017, a accéléré le calendrier… » C’est la cellule investigation de France Info qui déterre le lièvre, en pleine crise des Gilets jaunes : la suppression déguisée de l’ISF, symbole du début du quinquennat, adoptée dès 2018, n’aurait jamais dû arriver si vite sur le tapis. Macron avait prévu de ne la mener qu’en 2019. C’est que la cour des Comptes publie, à l’époque, un rapport au vitriol sur les finances publiques. Il suggère que l’État doit veiller à ses deniers, or l’ISF est une source de recettes : près de cinq milliards d’euros par an. Difficile de les imaginer disparaître d’un coup.
Mais, à peine élu, à l’été 2017, le nouveau Président voit débarquer à l’Élysée une cohorte de grands patrons : l’Afep entre en jeu. L’Afep, c’est Association française des entreprises privées, un puissant lobby qui regroupe de nombreux patrons du CAC 40, à faire passer le Medef pour une coopérative d’épiceries de quartiers. Pour eux, envisager de repousser la réforme sonne comme une trahison. « C’est une rencontre, secrète cette fois‑ci, qui est déterminante. L’Afep considère que si le président de la République n’agit pas immédiatement, il ne le fera jamais. Ils se rendent en délégation à l’Élysée pour demander un changement de calendrier. »
Et ça marche.
Dans la foulée, Bercy annonce que la réforme entrera en vigueur dès 2018. En même temps que la baisse des APL, et la hausse de la CSG pour les retraités…