n° 112  

Les petites mains : un vrai système mafieux !

Par Le SPMF, syndicat des petites mains de fakiriennes |

On veut bien revendiquer, manifester, nous les Petites mains, mais c’est que les nouvelles fréquentations du dirlo nous inquiètent un peu…


La réunion d’équipe touchait à sa fin, tout le monde s’apprêtait à vaquer à ses occupations. Alors que certains se levaient déjà, ou allumaient leur clope, Tristan a glissé, l’air de rien et pas trop fort, l’info la plus importante du jour.

« Ah oui, j’oubliais, la semaine prochaine je ne serai pas là, je pars une semaine dans le sud de l’Italie…
— Tu prends des vacances ? T’aurais pu le dire, il va falloir qu’on s’organise… a pesté Magalie.
— Parce qu’y a plein de boulot, le site à lancer, la visite de l’Urssaf, le nouveau numéro à sortir, le logiciel pour les abonnements à apprivoiser…, a renchéri Pascale, inquiète.
— Non non, c’est pas des vacances, ouh la la, c’est pour travailler, je vais travailler dur, même, ça va sacrément bosser ! »

Tout le monde autour de la table s’est regardé, surpris.
Après un silence, ça a été un véritable feu d’artifice d’espoir et de joie.

« On attaque le marché italien, c’est ça ? Petit cachottier ! Fallait nous le dire, si on se lance à l’international, parce que ça change des choses au niveau boulot, se sont projetées les filles.
— On va déménager ?
— Je savais que Fakir se développait, mais pas à ce rythme ! Bon, faut voir comment on va s’organiser, pour former des gens sur place, pour les allers-retours…
— La Toscane. Si on doit choisir des locaux là-bas, je vote pour la Toscane.
— Ou Venise, pourquoi pas ? C’est très calme, hors saison, il paraît.
— Plus près des Alpes, ce serait pas mieux ? »

Le dirlo a eu un petit rictus gêné.

« Ah ah, non, n’allez pas trop vite, c’est juste qu’on a été invités là-bas une semaine par une ONG, qui veut nous présenter son combat contre la Mafia. »

Deuxième silence autour de la table. Personne n’y comprenait plus rien.

« Mais c’est quoi, le rapport avec Fakir ?
— Ben, on lutte contre l’injustice, tout ça, et la mafia c’est injuste… Et puis, je leur avais bien dit qu’on n’irait pas, mais ils nous ont quand même pris les billets, tout réservé, tout payé, sans prévenir ! Ils ont dû mal comprendre. Du coup on est obligés d’y aller. Et comme Cyril ne pouvait pas, avec le bouclage, alors…
— Ah mais j’ai rien à voir là-dedans, moi ! » s’est lâchement désolidarisé le rédac’ chef.
« Attends, attends… Quand tu dis ils ’nous’ ont pris des billets, ’on’ est obligés… Tu parles de qui ?
— Ils l’ont pas réservé à mon nom, le billet ? Vérifie ! a tenté Pascale.
— Et y a peut-être aussi besoin d’un chargé de com’, sur place, non ? » a essayé Clément.

Tout pâle, notre directeur a fait mine de fouiller dans ses papiers, puis a pris un air faussement surpris. « Ah la la, désolé, je vois qu’ils ont pris le billet à mon nom, je vais être tenu d’y aller en personne, je crois… »

Bon : il paraît qu’il a vraiment bossé, là-bas.

Nous aussi, les petites mains, ici : on a creusé un trou dans son bureau, site de notre futur jacuzzi. Et mis un meuble dessus, qu’il ne s’en aperçoive pas. Faudrait juste qu’il ne fasse pas appel à ses nouveaux contacts dans la mafia pour régler les problèmes de personnel à Fakir, quand même…