Léonore Moncond’huy, 34 ans, ancienne cheffe de projet des organisations de protection de l’enfance, depuis 2020 maire à plein temps de Poitiers (Vienne), 90 240 habitants.

La phrase

« "Vacances pour tous", ça renvoie à un imaginaire qui fait rêver. »

Quoi ?

« Notre objectif est que d’ici 2026 chaque enfant de 8 à 12 ans qui habite Poitiers soit parti au moins une fois en vacances. Alors la ville propose des séjours de plusieurs jours à la mer, en pleine nature, en forêt, des séjours pour faire du sport, du poney… Ce sont de vraies colonies de vacances. Le tarif est adapté aux revenus des familles : le premier commence à 2 euros par jour, mais même les familles les plus aisées ne payent que la moitié du coût du séjour. C’est important d’avoir une mixité. Pendant l’année scolaire, les écoles sont très sectorisées, il y a peu de brassage entre les quartiers. Nous avons aussi une offre pour les jeunes de 16 à 25 ans qui n’ont plus envie de partir en colo : la mairie leur propose une aide pour financer leurs vacances en autonomie. »

Pourquoi ?

« L’ambition est de reconnaître les vacances comme un droit pour tout le monde, et en particulier pour les enfants. Le plan "vacances pour tous", c’est la première politique que nous avons mise en place. Quand on l’a lancé en 2021, on venait de sortir du confinement. Les enfants avaient passé des mois enfermés dans des appartements, ils avaient besoin de s’évader. Permettre à toutes et tous de partir en vacances répond à un vrai besoin, et c’est pour une fois une politique sociale qui n’est pas liée à l’emploi. »

Comment ?

« On a fait appel à des structures d’éducation populaire, comme la Ligue de l’enseignement. Poitiers leur achète des séjours. Les parents inscrivent leurs enfants dans les guichets vacances installés dans les mairies de quartiers. Si on veut toucher le public qui ne part pas en vacances, il faut pouvoir aider les parents, les rassurer sur le fait de laisser leurs enfants plusieurs jours : du coup, des agents les accompagnent dans les démarches. Il faut aussi un accompagnement matériel : un partenariat avec des entreprises du territoire nous permet de donner aux enfants qui en ont besoin un kit avec duvet, gel douche, dentifrice, crème solaire, etc. Quant aux jeunes de 16 à 25 ans, on leur propose de monter un projet en équipe. Ils peuvent se faire aider par les maisons de quartier, la mission locale ou les foyers de jeunes travailleurs. Si le projet est cohérent, que le budget tient la route, on leur donne une subvention en chèques vacances. »

Combien ?

« En 2024, Poitiers a consacré 629 000 euros au plan "vacances pour tous". Assumer ce coût, c’est une question de choix politique. On n’a pas supprimé de service, mais dès qu’on a eu des marges de manœuvre supplémentaires dans le budget de la commune, on les a affectées à cette politique. »

Un témoin

Lina, 8 ans : « Je suis venue en colonie de vacances pour ne plus trop rester à la maison, et pour connaître d’autres enfants… J’ai appris à faire des choses, à dormir dans des tentes, à faire des cabanes dans la forêt. Il y avait plein d’enfants de mon âge. C’était des super vacances. »

Les étapes

2020 : Prise de contact auprès des structures d’éducation populaire qui proposent des séjours.
2021 : Lancement du plan « vacances pour tous ».
2024 : Premiers séjours organisés directement par la mairie. Séjours à la journée pour les personnes âgées.

Le Bilan

« 12 500 enfants et jeunes ont pu profiter d’un départ à la mer ou à la campagne. Et chaque année, dans les colos, on retrouve à une même table des enfants qui viennent de milieux très différents. Depuis cette année, pour augmenter le nombre d’enfants qui partent en vacances, on organise nos propres séjours. On a rénové le centre d’éducation nature, situé dans une forêt à quelques dizaines de kilomètres de Poitiers. La ville y organise des séjours en bivouac, en mode "trappeur". Ça a beaucoup de succès ! Cette année, on a également mis en place des départs à la journée pour les personnes âgées. »