Au gré des rencontres, aux quatre coins de France, petites initiatives et grandes idées de nos maires, de celles qui changent la vie des gens.
Mon maire, ce héros : cultiver son grand jardin

Gilles Pérole, 65 ans, retraité de l’Éducation nationale, adjoint au maire en charge de la mise en place de la régie agricole de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes), 10 531 habitants.
Quoi ?
« Sur une parcelle agricole de 4 hectares, trois employés agricoles, salariés de la commune, cultivent la quasi-totalité des légumes que mangent les enfants à la cantine. On dispose d’une cinquantaine de variétés. Tout est bio et produit selon les techniques de l’agroécologie, comme la rotation des terres, l’usage d’engrais verts pour enrichir le sol, la lutte biologique contre les espèces nuisibles… »
Pourquoi ?
« On a eu une prise de conscience au moment de la crise de la vache folle. Le maire, André Aschieri, a voulu une politique locale qui prenait en compte les enjeux de santé et d’environnement. Mais quand on a voulu passer la cantine au 100 % bio, on s’est rendu compte que les légumes que nous proposaient nos fournisseurs ne correspondaient pas à ce qu’on attendait. Les légumes voyageaient beaucoup, certains venaient d’Amérique du Sud et d’Afrique. On a essayé de s’approvisionner auprès de producteurs locaux, mais dans les Alpes-Maritimes, il y a très peu de production agricole, et les rares maraîchers bio ne répondent pas aux marchés publics des mairies. Alors d’une boutade, on s’est dit, "Y a pas, on va le faire !" »
Comment ?
« On a analysé la consommation en légumes par la cantine en une année. Avec l’aide d’un maraîcher, on a évalué la surface nécessaire pour produire cette quantité, et on s’est attelé à chercher le terrain qui correspondait. Celui qui était le plus approprié, et symboliquement le plus fort, était un terrain de 4 hectares que le maire venait de préempter. Lors d’une succession, les héritiers vendaient ce terrain, qui avait toujours été cultivé, à un promoteur immobilier pour y construire des villas de luxe ! On l’a récupéré. C’était marquer un coût d’arrêt à une urbanisation trop prégnante sur la côte d’Azur. On a ensuite investi dans un tracteur, des tunnels de culture, un système d’irrigation... Et puis, on a embauché le premier agriculteur en 2011. On est monté en puissance petit à petit. Comme la production est forte l’été, mais qu’il n’y a pas cantine, les légumes récoltés sont surgelés. Ils sont consommés en fin d’hiver, lorsque les récoltes sont plus maigres. »
Les étapes
2006 : volonté de produire localement les légumes de la cantine.
2008 : réalisation d’une étude de faisabilité sur un terrain agricole préempté en 2005.
2011 : embauche du premier agriculteur salarié de la commune.
2012 : la régie agricole entre en activité.
La phrase
« On apporte des aliments de qualité aux enfants et on préserve et entretient des espaces agricoles pour les générations futures. »
Un témoin
Gwendoline, une maman : « Deux de mes enfants sont scolarisés à Mouans-Sartoux. Avec leur classe, ils font des ateliers sur les terrains de la régie agricole. Du coup, ils sont ravis de voir comment poussent les légumes qu’ils mangent à la cantine. Ils mangent de tout, et trouvent parfois que c’est meilleur à la cantine qu’à la maison ! Nous, on venait vivre dans la région pour le travail, et on a choisi justement Mouans-Sartoux pour sa régie agricole. »
Le bilan
« Notre régie agricole communale produit chaque année 25 tonnes de légumes bio. Elle alimente à 96 % les besoins en légumes de la cantine et du restaurant municipal, soit 1200 repas servis par jour, hors pommes de terre. Dans les Alpes-Maritimes, il fait trop chaud et humide pour les conserver. Le passage au 100 % bio s’est fait à coût constant pour les familles, grâce à la réduction du gaspillage alimentaire et à la mise en place de menus végétariens. Au final, nous avons investi 90 000 euros dans le matériel, et l’emploi des trois salariés nous revient à 100 000 euros par an. Ils produisent des légumes qui nous coûtaient 60 000 euros par an. Les 40 000 euros de surcoût sont affectés au budget environnement, pour des services de préservation des sols et d’espace pédagogique pour les enfants et les familles. »