Dans la cuisine de Darwin (n° 111)

Trente ans que Darwin classe ses milliers de coupures de presse, collectées une à une, rangées dans des classeurs, des cartons, ou punaisées aux murs de sa cuisine. « C’est pour ne pas oublier d’être en colère », précise‑t‑il. Bienvenue chez le philosophe accro à la presse people.

Publié le 23 février 2024

Par

Les déserteurs du réel

Télérama, novembre 2023.
Il fallait s’y attendre : à force de voir évoluer des personnages de série, les gens se voient eux-mêmes comme des héros de fiction. C’est une nouvelle mode : se faire des films au propre comme au figuré, avec prises de poses, danses sur un passage piéton comme dans le film La La Land, tout ça bien sûr à poster sur les réseaux sociaux. C’est amusant quand on est gamin, ou ado, mais de là à le refaire quand on est adulte… Le problème, avec ce genre de comportements : on s'enferme dans une version édulcorée de la réalité. Les gens désertent le réel pour intégrer la fiction. Et à force, si tout devient une fiction en vidéo, on risque de ne plus avoir de prise sur rien. C’est une nouvelle étape, qu’on franchit ici. Ces gens ne sont pas fous, non, mais, contrairement à ceux qui reviennent dans le monde réel quand ils posent leur manette de jeu, ils continuent de croire à leur fiction. C’est une forme nouvelle de désinvestissement du monde. Peut-être est-ce à cause d’un quotidien qui devient chaque jour plus âpre, plus difficile ? En philosophie, on définit l’Homo sapiens par le savoir technique, ou par le rire – pour Bergson, ou par la conscience pour Descartes. Pour Paul Ricœur, ce qui nous singularise c'est qu'on ne cesse de se raconter des histoires. Mais avec les nouvelles technologies, on peut se laisser enfermer dedans. Tout cela est va

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