n° 93  

Le monde d'après

Par Valéry Chartier |

« L’effondrement du système financier est proche et tout le monde s’en cogne ! » Emmanuel Macron n’a pas eu de mots assez forts pour fustiger les revendications, face à la catastrophe boursière qui se profile. « Aujourd’hui on sacrifie nos dividendes pour sauver trois vieux avec de la fièvre, et demain ? On renoncera à la mondialisation pour sauver les insectes ? Où s’arrêtera cette folie ? Tant que les Français resteront attachés à leur petit confort égoïste, à leur Sécu… » Et d’avertir : « Dorénavant c’est chacun pour soi ! »

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Décroissance

« Il n’y a pas d’alternative à la décroissance des acquis sociaux ! J’ai entendu ce que disaient les chiffres, et eux ils ne mentent pas ! » Des centaines de milliards d’euros dilapidés en chômage partiel, aides ou autres prestations sociales. « Tout ça pour une vilaine grippe. » Voilà qui donne le vertige et qui témoigne d’un système à bout de souffle. « On ne va pas ruiner la France parce que Kevin ne sait pas tousser dans son coude ! » « La course sans fin au salaire, à la prestation sociale, au toujours plus de remboursements de sécu… ce n’est plus soutenable. » Voici venu le temps de la modération des aides sociales. « On ne peut pas se goinfrer de RSA sans penser aux générations futures. » Qui pourra regarder son enfant dans les yeux en lui disant, « si tu n’as pas la 5G c’est parce que papa a privilégié sa santé à ton bonheur » ? « Il est trop tard pour faire dans la demi-mesure. » Emmanuel Macron a donc sonné le glas du « en même temps ». Finies la retraite par répartition, la sécu et autres prestations sociales. « Il est temps de revenir sur terre et de sortir de sa zone de confort. » Fini le salariat. Dorénavant, on ira vendre sa force de travail au jour le jour. « Chaque matin, il faudra traverser la rue pour aller gagner sa croûte ! ça évitera de se trouver des excuses au premier rhume qui passe. » La fin du salariat, l’ubérisation générale, voilà qui devrait sauver l’essentiel : les dividendes. « Notre civilisation a besoin d’actionnaires, ces héros qui prennent les risques, nous montrent le chemin. Si nous cédons là- dessus, nous cédons sur tout ! »

Il est où le bonheur ?

Flexibilité et créativité, les secrets d’une vie réussie.

Emmanuel Macron a conscience du complet renversement de mentalité qu’il demande aux français. Mais il ne veut pas y voir un sacrifice. « C’est la dernière chance de remettre du bon sens dans nos existences. Il faut retrouver ce qui fait le sel de la vie, la joie de lutter chaque matin pour survivre. Et surtout s’attacher à ce qui est vraiment important : gagner de l’argent. Finalement c’est quoi le bonheur ? La thune plutôt que la Lune. » « Sentir le souffle de la précarité sur nos joues et être enfin vivants. » Emmanuel Macron a appelé les Français à reprendre leur existence en main. « Je vous propose de devenir des aventuriers du capitalisme. » Chaque matin le champ des possibles s’ouvre : livreur, préparateur de colis, aide à la personne… « Que vais-je faire aujourd’hui ? Aurai-je les moyens de manger, d’avoir un toit ? C’est Koh-Lanta tous les jours ! » Un peu plus excitant que de bosser comme fonctionnaire. « À 70 ans on a peutêtre mieux à faire pour son pays que de passer ses après-midis devant des Chiffres et des Lettres. Il faut se challenger ! » Le Président entend impliquer chaque Français dans le projet national. Et les invite à donner du sens à leur existence. Même par des petits gestes. « Est-ce que manger trois fois par jour me rend plus heureux ? Rappelez-vous les mots de Molière, ‘‘Il faut manger pour vivre et non pas vivre pour manger’’. » Incitant dans la foulée les Français à s’inspirer ainsi des grands penseurs, le Président a tenu à citer Laurence Parisot. « La vie, la santé, l’amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait à cette loi ? »

Les survivalistes

Même confiné dans son paradis fiscal, Jean-Eudes, est capable de foutre le feu à une usine en deux clics.

« Nous ne paierons pas leur crise ! » Ils sont une poignée, mais ils pèsent des milliards d’euros. Collapsologues, iIs ont depuis longtemps quitté un système qu’ils jugeaient dangereux, organisant leur survie dans des paradis fiscaux disséminés autour du globe. Avec un seul mot d’ordre, « spéculer ».

« Une bonne connexion internet, une appli de trading hautefréquence et je peux tenir un siège ! » Jean-Eudes, banquier en exil, a rejoint la cohorte de ceux que l’on pointait du doigt comme de vulgaires « exilés fiscaux », qui avaient juste le tort d’avoir eu « raison avant tout le monde ».

« On a joué les apprentis sorciers, on a pensé que l’on pouvait s’affranchir des lois du marché. Et la catastrophe est arrivée. » Jean-Eudes plaide pour un retour à des pratiques naturelles, qui respectent les cycles boursiers. « Si vous utilisez les profits, la croissance pour nourrir des improductifs, vous tarissez les dividendes, et la nature se venge ! »