Fakir : Vous publiez avec Jérôme Truc Grands ensembles, le résultat d’une enquête de terrain de dix ans à Grigny. Quelles sont les grandes lignes du livre ?
Fabien Truong : Le principe d’une enquête sociologique est d’aller au-delà des approches les plus courantes, ici des clichés sur les quartiers populaires : on entend très souvent que ce seraient des ghettos refermés sur eux-mêmes. Or ce qu’on montre très clairement, c’est que les quartiers populaires sont extrêmement connectés au reste de la société, et aux centres urbains en particulier. On voit les gens faire des allers-retours tous les jours pour aller bosser. On l’a vu pendant le Covid : les travailleuses et les travailleurs essentiels habitent les quartiers populaires. Et dans l’autre sens, comme le trafic de drogue est très important à Grigny, avec une trentaine de points de vente, on voit des clients qui viennent de Paris tous les jours. Grigny, c’est la ville la plus pauvre de France [NDLR : la deuxième en fait depuis peu, avec 44 % de taux de pauvreté, derrière Roubaix, 46 %], avec notamment deux grandes cités : la grande Borne et Grigny 2. La population de la ville a changé de moitié en dix ans. Il y a ceux qui partent, ceux qui restent, et ceux qui arrivent. C’est un livre où on prend le temps d’analyser ces trajectoires, loin du spectacle médiatique.
Fakir : À Trappes, le maire Ali Rabeh (notre entretien à lire ici)