Fakir : À l'automne 2022, à Caen, vous êtes une dizaine d’auxiliaires de vie à vous mettre en grève, sans aucune expérience de la lutte. Comment on en arrive là ?
Séverine Marotel : À l'époque, on survivait… On continuait notre travail parce qu'on l'aime, mais il y avait tellement d'augmentations des coûts, surtout le gasoil, qu'un matin on prend conscience qu'on n'a plus les moyens de travailler et de payer les factures. Mais on a des œillères : y a monsieur Untel qui est bloqué au lit, il faut lui faire les soins, donc on met de côté nos factures. Et puis un jour, le gasoil est à plus de deux euros le litre, alors on dit à nos patients qu'on ne pourra peut-être pas venir la prochaine fois... Et là, ils nous soutiennent ! Ils nous disent : « Séverine, il faut faire quelque chose ! Nous, on se débrouillera, mais si vous ne vous battez pas, rien ne se passera.
- Bon, on va se battre alors... » Le mardi suivant, il y a une grande mobilisation interprofessionnelle à Caen. Avec une collègue, on en parle autour de nous, et on est dix ce matin-là devant l'agence, à partir manifester. Là, on se rend compte qu'on n'est pas les seules à galérer, et on décide de ne pas reprendre le travail tant que ça ne changera pas. On est loin d'imaginer que ça va durer 45 jours...
« Elle nous prenait pour des connes... »
Fakir : Mais comment vous vous organisez ?
Séverine Marotel&nb