800 % : le plus rentable des investissements !

Les sorties répétées de Bruno Le Maire contre le « gratuit pour tous, tout le temps », nous le rappellent, s’il en était besoin : les gens comme lui ne voient l’école, l’hôpital, la solidarité nationale (que nous payons, par ailleurs !) que comme des coûts. On ne lui en veut même pas : il a été formaté comme ça. Il est incapable de raisonner autrement. Mais enfin, on va quand même essayer de l’instruire un peu, Bruno, notre « pire économiste de France ». Parce que, c’est tout l’inverse : l’éducation et le social sont des investissements. Et sans doute les plus rentables des investissements. On l’expliquait dans Fakir (mais il n’a pas dû nous lire), il y a près de dix ans, déjà…

Publié le 20 mars 2024

C’est une étude, parmi mille autres études, qui nous le disent : mettez des sous, du budget, dans l’éducation par exemple, et vous recevrez bien plus en échange. Cette étude, c’est le Perry School Project, l’une des plus anciennes et concluantes sur le sujet :
« Au milieu des années 1960, un échantillon d’environ 130 enfants entre 4 et 5 ans issus de familles pauvres noires américaines est divisé en deux groupes de tailles à peu près identiques, un groupe expérimental (qui bénéficiera du projet) et un groupe de contrôle (qui n’en bénéficiera pas). Le groupe expérimental se voit proposer pendant deux ans un programme d’éveil et de préparation assez intense, avec deux heures et demie de classe par jour (quatre maîtres pour des classes d’environ vingt élèves) ainsi qu’une visite hebdomadaire dans la famille pour informer et former les parents. Les comparaisons disponibles quant à leurs destins scolaire et social sont éloquentes. Devenus jeunes adultes dans les années 1990, très rares sont les enfants du groupe de contrôle à gagner plus de 2 000 dollars par mois alors que c’est le cas de la majorité des bénéficiaires du soutien préscolaire. L’expérience démontre ainsi un impact de long terme considérable. Les moyens mis en œuvre par enfant dans le cadre de ce projet sont très importants (à peu près 15 000 dollars par an et par enfant), mais les évaluations aujourd’hui disponibles révèlent que les bénéfices sociaux (ne serait-ce qu’en termes d’aides sociales économisées et d’incarcérations évitées) sont près de huit fois plus importantes. » (cité par Éric Maurin dans Le ghetto français, Seuil, 2004.)

Or, de l’argent, il y en a…
Mais où trouvera-t-on l’argent pour financer cet investissement ?
Les « caisses sont vides, le gratuit c’est fini », pleurniche Bruno Le Maire, qui ose même nous promettre 10 milliards de coupes budgétaires, dont 700 millions en moins pour l’éducation (il n’a vraiment pas lu Fakir).
Et pourtant…
Pourtant, durant les vingt dernières années, l’État a trouvé des milliards en pagaille pour d’autres choix, d’autres priorités.
Emmanuel Macron a inventé et pérennisé, d’abord comme conseiller puis ministre de Hollande, puis comme Président, le Crédit impôt compétitivité emploi (CICE) : 22 milliards d’euros sont délivrés, chaque année, aux entreprises. Trois fois le budget de la Justice, trente fois celui de la Jeunesse et des Sports…
Et pour quels résultats ? D’après un rapport France Stratégie, organe rattaché au Premier ministre, ce CICE aurait permis de créer ou sauver entre 100 000, au mieux, et zéro emploi. Soit 200.000 € par an et par emploi ! La moitié de ces crédits sont partis, directement, dans les profits des multinationales… À la place, si on confiait la même somme au public, c’est près de 600 000 postes (dans l’éducation, dans les hôpitaux, etc.) qu’on pourrait créer. Avec une plus grande utilité sociale. Avec plus d’efficacité contre le chômage, également.
Et on passe sur le reste, tout le reste, délétère pour nos finances : l’ISF supprimé (5 milliards par an), la Flat tax (1,3 milliard par an)… En tout, ce sont plus de 200 milliards d’aides, le premier budget de l’État, qui sont déversées sur les grandes entreprises en particulier, et sans contrepartie.
Pour quelqu’un comme Bruno qui n’aime pas le « tout gratuit », ça doit faire un choc, tous ces sous versés sans rien en retour…
Alors, nous, on lui propose un grand plan, pour qu’il retrouve « son » argent (qui est en fait le nôtre), et même huit fois la mise de départ : appliquer partout, pour tous, le Perry School Project !

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