Carlos Tavares, génie de la délocalisation

Délocaliser, virer ses salariés, polluer la planète : il en faut, du génie, à un « capitaine d’industrie » comme Carlos Tavares, pour toucher 36 millions d’euros par an. Tout en étant abreuvé de subventions par l’État…

Publié le 24 octobre 2024

Carlos Tavares, 66 ans, c’est le patron de Stellantis, 3e groupe mondial de vente de bagnoles, né de la fusion de Peugeot-Citroën et Fiat-Chrysler en 2021. Un groupe grâce auquel Carlos se gave : 36,5 millions d’euros de revenus en 2023. Soit 100 000 euros, ou six ans de Smic, chaque jour. 518 fois le salaire moyen de sa boîte. À ce tarif-là, on se dit que notre « capitaine d’industrie » a dû faire des miracles à la tête de sa boîte. Lui faire gagner plein d’argent qu’il a redistribué illico aux salariés, ou alors qu’il aura investi dans des énergies d’avenir, ou dans un plan massif d’embauches.
Raté.

L’idée de génie de Carlos, ce fut de gonfler les prix de ses véhicules. Jusqu’à 82 000 euros la Jeep ! Avec ce calcul, en grand visionnaire qu’il est : si on augmente les prix, eh ben on gagnera plus d’argent. Eh ben non : à 82 000 euros la jeep, la demande ne peut pas suivre. Les ventes s’effondrent, atteignent leur plus bas niveau depuis 2021. C’est que dans un marché ultra concurrentiel, face à des véhicules chinois biens moins chers et subventionnés par l’État, Carlos fonce droit vers le mur, le pied sur l’accélérateur, qui plus est. C’est que la Chine, comme les États-Unis, n’ont pas peur de subventionner leurs véhicules, en particulier électriques, alors que le protectionnisme reste un gros mot pour l’Union européenne, éternel dindon du marché. Alors, Carlos Tavares se gratte la tête, et sent poindre une autre idée de génie, en mode « retournement de veste » : puisque les véhicules chinois sont moins chers, devenons chinois. Il acquiert donc 20 % de Leapmotor, start-up de l’Empire du milieu, qui produit des modèles électriques à bas prix, et propose de lui ouvrir les portes du marché européen. Conséquence ? La France, l’Italie et les États-Unis, bases historiques de Stellantis, où le groupe réalise 75% de ses ventes, sont menacées.

Alors, pour continuer à percevoir les revenus que son génie mérite, Carlos va couper des têtes, beaucoup de têtes – celles des ouvriers – et délocaliser à tour de bras. Son mentor en la matière, c’est un autre Carlos, Carlos Ghosn. Tavares a été son bras droit chez Renault. Un chasseur de têtes parisien le souligne : Tavares, comme Ghosn, sont des « êtres robotiques » qui « pilotent sans état d’âme ». Chez PSA, Tavares avait déjà supprimé 13 700 postes en France en trois ans, de 2015 à 2018. Depuis son arrivée à la tête de Stellantis en 2021, c’est pire : 26 000 postes ont été rayés de la carte. En Italie, 10 000 emplois sont menacés. Les centres de recherche et développement français devraient être délocalisés en Tunisie, au Maroc ou en Roumanie. Même l’usine historique de Peugeot serait sur la sellette. C’est mauvais pour la planète à cause du transport, c’est mauvais pour les salariés qu’il vire et leurs familles, c’est mauvais pour tout le monde, en fait, mais c’est pas un souci : Carlos est là pour faire du chiffre, et surtout pour lui.

Autre idée géniale, pour y parvenir : chouiner auprès de l’État français pour lui gratter de l’argent – ses idées sont si bonnes, il le vaut bien. Carlos et son groupe ont ainsi palpé 494 millions d’euros d’aides publiques, de nos sous, donc, rien que sur les neuf premiers mois de 2024. Sans aucune contrepartie de maintien de l’emploi, bien entendu.
Tout ça alors que l’État français est actionnaire de Stellantis !
Qu’il devrait le virer, manu militari, au lieu de l’abreuver d’argent public !
Même en interne, ça gronde. Son équipe de direction alerte. Sa directrice financière, le responsable Europe, le responsable États-Unis tirent la sonnette d’alarme sur le scandale en cours. Carlos fait à nouveau montre de vista : il les vire. Toutes et tous. Un génie, s’il est incompris, ne peut mener son œuvre à bien.
Ultime précision : Carlos Tavares, cet assisté d’en haut, ne s’estime « pas assez fortuné » pour payer un éventuel impôt sur les ultra-riches. 36 millions, ce n’est donc pas assez. Il faut gagner combien, pour participer à l’effort collectif ? Pour rendre un peu à l’hôpital, à l’Éducation nationale, encore amputée de 4000 profs ? Ou alors, c’est qu’il estime que nous faire profiter de son génie suffit…

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