Fakir : Julia Cagé, puisque vous travaillez entre autres sur les médias, une question à ce sujet : on disait récemment, dans un de nos éditos, que sur le plan idéologique comme économique, on assiste à une alliance entre l’extrême argent, cette droite qui possède les médias, et l’extrême droite. Bref, que parmi les mille obstacles qu’elle doit affronter, la gauche doit aussi composer avec ça… Vous êtes d’accord avec cette analyse ?
Julia Cagé : Oui on assiste à une accélération de cette alliance. C’est quelque chose que je constate dans mes travaux sur les médias, le financement de la démocratie, et dans les travaux pour notre livre avec Thomas Piketty [NDLR : Une histoire du conflit politique, chez Seuil].Vous avez raison, c’est bien une alliance : entre la droite de la droite et les Républicains. C’est ce qu’on a appelé « la contradiction du bloc de droite » : le programme du RN est favorable aux plus riches, on l’a vu notamment avec leur vote contre le rétablissement de l’ISF, mais ils conservent un électorat populaire.
Fakir : C’est ce que vous montrez dans votre livre Une histoire du conflit politique : l’électorat du RN est de plus en plus populaire…
Julia Cagé : Oui, si on prend le Front national aux origines, si vous remontez à Jean-Louis Tixier-Vignancour [NDLR : premier candidat d’extrême droite à l’élection présidentielle, en 1