Les sans-famille

Le Parti Socialiste navigue toujours à vue, la voile molle, sans boussole idéologique. Le vaisseau fantôme du Parti Communiste a touché le fond, sans que les mousses à bord ne s’en émeuvent…

Publié le 1 septembre 2007

Le Parti Socialiste navigue toujours à vue, la voile molle, sans boussole idéologique. Le vaisseau fantôme du Parti Communiste a touché le fond, sans que les mousses à bord ne s’en émeuvent. De la gauche de gauche, il ne reste que des débris épars, des rescapés qui ne se rassemblent même pas sur un canot de sauvetage. La Ligue Communiste Révolutionnaire s’empresse de hisser son drapeau au plus haut, c’est-à-dire bien bas, crie presque victoire, fière de régner sur des décombres.

Un spectacle pathétique. Et l’on comprend que les moins bien amarrés à ces embarcations, trop fragiles, zigzagantes, se soient réfugiés sur le destroyer, bien armé, sûr de son chemin, de la droite. Lui au moins, fermement, se dirige vers un port.

Panne de générosité

Localement, dans la Somme, on n’arrange pas les choses. Au contraire : on aggrave le cas. Il suffisait, déjà, de se balader dans les meetings pour entendre les copains de Besancenot médire des camarades de Buffet ou de Bové. Et vice versa.
Sans compter, ensuite, les querelles internes au PCF… Qui présente, aux législatives, un candidat contre Maxime Gremetz. Qu’on y ajoute les inimitiés entre personnes, entre clans, avec une mémoire d’éléphant des affronts, du genre » mais en 1937, vous n’aviez pas écrit une ligne ironique sur etc. «  Même pour la défense des sans-papiers, on est parvenus à se déchirer.

Il ne s’agit pas, tout sauf ça, de donner raison à Untel et tort à Machin. Juste que ça navre, cette gauche pour qui l’horizon s’ouvrait après le référendum du 29 mai et qui est parvenue, lentement, sûrement, à s’enfermer, à foncer droit dans le mur de la défaite. Juste, enfin, que toutes ces mesquineries ne promettent rien de grand, rien de généreux.

Force d’entraînement

On ne perdrait que des bulletins de vote, à la limite, qu’importe. Mais en route, on se perd aussi. On perd ses compagnons. On l’a tous rencontré, le désarroi de ces sympathisants qui, devant tant de choix, tant de nuances, ne sachant pour qui s’engager, ne s’engagent pour personne. On l’a tous ressenti, le trouble de ces militants qui, tractant à l’entrée de la gare, se doivent d’expliquer pourquoi ils soutiennent Olivier et pas Arlette, pourquoi José et pas Marie-George. Dans les manifs, les activistes vieillissent à vue d’œil, et combien de jeunes antifascistes du 21 avril 2002 ont renouvelé leurs rangs ? Combien de manifestants anti-CPE ? Bien peu. Les médias, le consumérisme ambiant, le zapping des causes, y sont pour quelque chose, sans doute. Mais le fractionnement en petites chapelles aussi, incapables de produire une force motrice, une force d’entraînement, bref, un espoir de transformation.

On pourrait aligner, ici, les motifs de désespérance. à la place, voici le portrait d’un héros discret décédé l’été dernier, un militant sans parti qui, sa vie durant, a recherché cette  » force motrice « .

(article publié dans Fakir N°33, mai 2007)

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