"Je fis mon premier bal en mars 1972, à Montescourt-Lizerolles; la salle des fêtes était bondée. Les danseurs s'étaient aspergés d'eau de toilette et de déodorant bon marché. L'orchestre s'appelait les Hans Eder. Paul, un chanteur au visage rond et rose, expulsait dans un micro Bouyer les refrains de la variété en vogue. Parfois, au détour d'une chanson, Rico délaissait son accordéon pour le remplacer. Les autres le laissaient parfois seul, "avec son musette". Je tentais de le soutenir en appuyant des accords métalliques sur ma guitare de fortune. La fumée de nos gauloises, qui se consumaient dans des cendriers en aluminium, nous piquait les yeux. Il faisait chaud dans la salle des fêtes de Montescourt-Lizerolles; les autres musiciens croquaient à pleines dents dans les sandwiches au saucisson sec que leur avait apportés les membres du comité des fêtes, organisateurs de cette soirée."
Dans son roman, Philippe Lacoche ne ressuscite pas que son copain Rico, mort trop jeune, trop seul, trop amer et on ne sait trop comment. C'est tout une époque qui revit avec lui, un temps où ces musiciens, "ouvriers dans une immense usine de cycles et de cyclomoteurs, à Saint-Quentin", ne comptaient "pas en jours, ni en semaines ou en mois, mais en bals".
Bals dans la peau
Qui s’en souvient, des petits bals du samedi soir, avec les remorques des cultivateurs comme estrades? Qui s’en souvient, de cette Picardie des années 70, où les plus jeunes rêvaient d’une guitare électrique tandis que les anciens jouaient de l’accordéon? Philippe Lacoche évoque ces années rock-Aisne-roll, et ses compagnons de musette se les remémorent avec lui.
Publié le 24 octobre 2007
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