Quoi ! vas-tu mener, Jean-Pierre,
Mon doux goret au marché ?
As-tu donc un coeur de pierre
Pour le livrer au boucher ?
Je verrais ma vache grasse
S'en aller, sans nul regret,
Si tu voulais faire grâce
Au joli petit goret !
On est au marché au cadran, ce lundi, à Plérin, dans la banlieue de Saint-Brieuc. Le lundi, c'est un petit marché, comparé au jeudi. 25 000 porcs vont quand même s'y vendre, en quarante-cinq minutes.
Il a la goule rosée
Comme le blé-noir fleuri,
Elle est tant et tant rusée
Qu'on dirait souvent qu'il rit ;
Il me fait des mignardises
Ainsi que le sous-préfet ...
Mais il dit moins de bêtises,
Mon joli petit goret !
Dans l'entrée, sous des cadres de verre, est reproduite la chanson de Théodore Botrel, " Le petit goret ", avec des cartes postales en noir et blanc, des Bretonnes à hautes coiffes dans leurs fermes à l'ancienne. C'est ainsi, souvent : les institutions présentent l'image inversée de leur réalité.
Je veux, pour sa récompense,
Le nourrir avec grand soin
Jusqu'à ce qu'il ait la panse
Comme celle de l'adjoint !
Pour lui prouver que je l'aime,
Quand viendra l'heure au pauvret...
Je le mangerons... moi-même,
Mon joli petit goret !
Car dans ce marché moderne, on n'en verra pas un seul, de " petit goret ". Derrière leurs écrans d'ordinateurs, parfois à distance, les acheteurs – les abattoirs Bigard, les filiales d'Intermarché ou de Leclerc – raflent des lots de 180, 200, 300 cochons, toutes les dix secondes.
Sur
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