Et si la fraternité ne dure qu'une minute, il faut la prendre, la mordre à pleines dents, en retenir le goût, de cette chaleur, pour tous les jours sans tendresse.
Surtout José Alfonso.
Depuis l'enfance, lui va de déchirements en arrachements. D'avec ses parents, d'abord, dès ses trois ans, eux partis pour les colonies portugaises, pour l'Angola, pour le Timor, tandis que le petit, à la santé fragile, est balloté entre les oncles et tantes. D'avec sa femme, ensuite, à cause de la misère, des dettes, et lui qui ne renonce pas à chanter, marginal sans avenir. D'avec ses enfants, aussi, après le divorce, confiés à leurs grands-parents, alors au Mozambique. Et le voilà balloté, maintenant, toujours, enseignant sans diplôme, remplaçant, de Mangualde à Lagos, de Faro à Coimbra, la mélancolie vissée à l'âme, sans famille, mal à sa place et mal dans sa classe.
Alors, ce soir, ce dimanche 17 mai 1964, à Grãndola, au sud du Portugal, dans le local de la SMFOG – la Société musicale, ouvrière, qui l'invite – José Alfonso savoure. La petite salle est bondée, deux cents personnes, tellement pleine à craquer que Zéca donne tout son récital, même sa chanson maudite, Os Vampiros, les Vampires, qui a éclaté comme un tonnerre :
A quoi sert une chanson…
« Grãndola vila morena… » Juste quelques lignes gribouillées, au départ, pour remercier des camarades. Et voilà qui devient, dix ans plus tard, le chant d’une révolution. Et qui est repris, encore aujourd’hui, contre la troïka. Quand l’art épouse le peuple…
Publié le 27 octobre 2014
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