Un monde est mort, il court encore… La preuve par le poulet (1)

Voici la première partie du dossier consacré au plan social chez Doux (numéro 57). Un recueil de témoignages d’ouvriers de l’usine Doux de Graincourt (62), notamment celui d’Annabelle, 48 ans, élue au comité d’entreprise.

Publié le 10 janvier 2013

Mais est-ce que vous êtes heureux, ici ? " Des rires répondent. Une hilarité collective, contenue. Qui passe d'un rang à l'autre : " T'as entendu ce qu'il a demandé ? “Est-ce qu'on est heureux, ici ?” - Il veut rigoler ! On est là pour la paye… - C'est la chaîne. " Le moment est mal choisi, c'est vrai, pour les questions existentielles : on piétine à l'entrée de l'usine Doux, à Graincourt, dans le Pas-de-Calais. Clopes au bec, moustaches inquiètes, sacs à main en bandoulière, ouvrières et ouvriers sont rassemblés sur le parking, par petits groupes, en ce matin de juillet. Ils débraient depuis l'aube, espèrent encore. Conservent des lambeaux de foi. Qu'il y aurait des projets de reprise, que " là-haut ils vont sortir un lapin blanc de leur chapeau ". En visite sur le site, d'ailleurs, l'administrateur judiciaire leur a confirmé qu' " il y aurait, éventuellement, deux acheteurs potentiels ", et malgré le conditionnel, et le " éventuellement ", et le " potentiels ", eux veulent y croire. Malgré les déceptions passées, aussi : " Ils nous ont menti sur un Hollandais, qui devait venir, qui pouvait racheter, mais on l'a jamais vu. Comme ça, on se tient sage. On travaille bien jusqu'au bout. On remplit les commandes. " Et à eux que l'angoisse tenaille, je jette mon interrogation bourgeoise : " Mais est-ce que vous êtes heureux, ici ? " Après la surprise, les remarques fusent, en vrac, de Philippe, Sylvie, Virgi

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