Nos lecteurs sont les meilleurs ! (n° 95)

Le courrier des lectrices et des lecteurs reçu et traité par notre bénévole Nicole. Nous écrire : courrier@fakirpresse.info

Publié le 15 octobre 2020

On achète la vie

Claude-René, par courriel.

Quand Claude-René prend l’avion, il a des envies de lutte des classes…

La chef de cabine de l’avion vient de le dire devant moi : « dans la zone bizness, on laisse une place de libre entre deux passagers, pas dans la zone economy. » Que faut-il en déduire ? Qu’avec de l’argent on achète de la sécurité, ou alors que la vie de ceux qui ont plus de moyens a plus de valeur que celle des autres ?
Dans la vie de tous les jours, il y a mille manières de marquer les différences de revenus : le vêtement, la montre, le smartphone, la voiture, le domicile. Dans les transports en commun, ces différences de revenus pourraient être estompées. Eh bien non ! Poussé je ne sais par quelle puissance ténébreuse, le concept de classe (1,2 ou 3) est apparu.
J’ai beaucoup de mal à supporter cette différentiation par l’argent. On se demande pourquoi la fameuse devise « liberté, égalité, fraternité » continue de subsister sur les documents officiels. Ça sonne « orwellien ».

Dépressif du bikini

De Jacques-Olivier, par courriel, le 2 août.

La vacuité de notre monde se cache parfois dans un morceau de tissu connecté.

Je suis enseignant-chercheur en électronique et les objets connectés, l’internet des objets, les capteurs intelligents, font partie des buzz-words qu’on se doit inclure dans nos projets pour faire financer nos recherches. Je ne connaissais pas le décapsuleur connecté, mais j’ai découvert il y a quelques années le bikini connecté. La pub laissée par un collègue en salle café montrait des naïades alignées sur le bord d’un yacht. Le maillot de bain connecté calcule la dose de soleil reçu pour signaler sur ton Smartphone quand une nouvelle couche de crème solaire est nécessaire. Mais le must c’est l’option qui envoie un SMS à ton copain pour qu’il le fasse à ta place. Tout d’un coup, nous avions sous les yeux la vacuité des « enjeux sociaux » que nous étions supposés défendre. J’avoue avoir eu du mal à m’en remettre. Cet épisode n’est pas étranger à la réorientation de ma carrière vers la pédagogie universitaire pour aider à former des citoyens critiques.

Souvenirs de fête

De Jean-Pierre, de Limas, le 1er août.

Jean-Pierre corrige notre rédac’ d’histoire.

« Âgé de 80 ans et pas encore complètement amnésique, je me permets de compléter votre rappel historique de l’article relatif à la commémoration du 14 juillet [voir Fakir 94]. En 1946, de Gaulle ayant claqué la porte, le « tripartisme » (PCF, SFIO, MRP) ne dura guère ; Jules Moch fera tirer sur les mineurs en grève. SFIO et MRP (bientôt « apparentés », drôle de famille) chassent les « cocos » du gouvernement et pondent la première loi anti-laïque (1952, loi Marie-Barangé).
En 1936, la gauche unie avait fait du 14 juillet une fête populaire ; après-guerre cette célébration (manifestation) reprend à l’initiative du PCF et de la CGT. Le 14 juillet 53, la manif’ est réprimée : la police tire, faisant 7 morts (6 travailleurs algériens qui brandissaient le drapeau de l’indépendance et un militant du PCF) et de nombreux blessés. La « manif prolo » du 14 juillet sera désormais interdite.
Ce n’est pas la gauche dans son ensemble qui a abandonné une célébration populaire du 14 juillet. Celle-ci fut victime du commencement de la « guerre froide » (plan Marshall, création de F.O brisant l’unité syndicale, apparentement MRP/ SFIO), victime également de l’ébranlement de l’empire colonial français. […] »

Surveillance générale ?

Luc, de Plachy-Buyon (80), le 28 juillet.

À 88 ans, Luc n’aime pas qu’on remplace des gendarmes par la délation.

Sans doute es-tu au courant de ce que l’Administration dénomme : «  dispositif participation citoyenne ».
Dans mon village, cela s’est traduit par une demande de l’Adjudant de la Gendarmerie la plus proche, située maintenant à plus d’une demi-heure de route, pour que la Commune désigne « une personne qui sera en charge de remonter à la Gendarmerie les incivilités ou suspicions d’infractions » dans le cadre de ce dispositif.
Par bonheur les conseillers ont décidé de ne pas donner suite.
C’est pas mal la Chine !
Mais il y a encore des Picards qui préfèrent rester Picards. Hourrah !
Amiteusement.

La Palme du Fayot

En ces temps de crise, notre prix de la Lèche peut faire la différence sur un CV. Il y a pourtant des Nostradamus pinailleurs, comme Franck : « Vous trouverez ci-joint un chèque de 60 euros, correspondant à un abonnement militant pour une période de deux ans. Passé cela, l’abonnement ne sera plus nécessaire. En effet, le patron sera devenu Président de la République et Fakir sera distribué gratuitement à toute la population… » Fakir gratuit ? On a failli s’étrangler. Recalé.
Car voilà la clé : notre grand jury, on l’achète et il ne s’en cache pas. Gérard, de Paris, abonnement passion à 50 euros : « Fakir mérite bien plus qu’un chèque. Avec des moyens dérisoires, il fait rire et pleurer, il dit ce qu’aucun autre ne dit. Il crie ce qui se tait, il montre ce qui ne l’est jamais. » Pas mal. Richard, de Saint-Hyppolite du Fort, a lui sorti la calculette : « 200 € nous met l’abonnement à vie au tarif de celui de 13 ans et 4 mois… alors, penser que tu m’accordes encore 13 ans et 4 mois, ça me rend guilleret. » Encore mieux. Jusqu’à l’ascenseur émotionnel : Daniel, de Lançon de Provence, nous envoie un billet de 20 000 Cedis (la monnaie du Ghana !). Vérification faite auprès du bureau de change, le billet n’avait plus cours. Dans quel monde on vit…
Marine, d’Ile-et-Vilaine, nous a consolés avec son lot de masques jaunes, « même si bon, en manif c’est pas terrible avec les lacrymos, quand le tissu est imbibé, ça pique le nez. » Mais c’est Grégoria, de Gap, qui a fait chavirer nos âmes : « Je me permets de vous adresser une partie de ma prime Covid, persuadée que vous en ferez bien meilleur usage ! Déjà en tant que médecin urgentiste je suis loin d’avoir besoin de 1000 € de plus sur mon compte en banque… En plus cette prime met assez mal à l’aise, car si on avait un système de santé respectueux de chacun, cela ne viendrait pas à l’idée de « récompenser » les « héros » avec des miettes… »
La voilà, notre Palme : Grégoria, on essaiera de s’en montrer dignes !

Articles associés

Pour ne rien rater, inscrivez-vous à la

NIOUZLAITEUR

Les plus lus

Les plus lus

Retour en haut