Paris, lundi 11 janvier.
Je taille le bout de gras, et je le bouffe en même temps, chez Gérard Filoche : " T'as pas vu, Queimada ? il me demande. C'est un vieux film, avec Marlon Brando. Y a une révolte d'esclaves, à Haïti, et lui vient voir les propriétaires terriens :
‘Faites-en des salariés ! il leur dit. Ça vous coûte trop cher, l'esclavage ! Vous êtes obligés de nourrir vos esclaves, de la naissance à la mort, libérez-les, ça vous coûtera moins cher. Salariez-les ! Vous ne les payerez que quand vous en aurez besoin !' Et moi, je commente : ainsi naît le salariat. Voilà l'immédiat après-esclavage, et l'histoire du salariat, les 170 ans d'histoire du salariat, c'est la reconquête des avantages de l'esclavage ! C'est le paiement de l'acte productif, mais aussi des cotisations pour couvrir la maladie, la vieillesse, la maternité… - C'est pas très bandant, quand même, je remarque, comme projet, de défendre les avantages de l'esclavage… - Oui, mais bien sûr, nous avons en plus les congés, la liberté. Sur les conseils du camarade Gérard, on a donc regardé Queimada. Un film jubilatoire de cynisme.Qui, tel un " art de la guérilla " façon Sun Tzu Guevara, délivre en images des leçons d'actions, révolutionnaire ou contre-révolutionnaires. Ainsi l'espion anglais, Sir William Walker – alias Marlon Brando – convainc-t-il les propriétaires de renoncer d'eux-mêmes à l'esclavage :
"Messieurs, laissez-moi vous poser une question. Ma



