« Moi je suis fille de prolos et musulmane, et ce qui m’a sauvée c’est que j’ai adhéré aux jeunes communistes, où j’ai découvert le combat de classes. Je te raconte, si tu veux ? »
Ça faisait, quoi ?, quinze ans, je pense, que je n’avais pas vu Mimouna Hadjam. à l’époque, je bossais beaucoup dans ce coin, à la Courneuve, en Seine-Saint-Denis. Son asso, Africa 93, antiraciste et féministe – l’une des premières du genre, créée en 1987 – était déjà une institution, dans le quartier. Elle faisait beaucoup de soutien scolaire, à la cité des 4000.
Je me suis paumé en revenant la voir : le quartier a vachement changé. Mais ça valait le coup. On a causé trois, quatre heures peut-être, à refaire le monde, avec Jamila, sa collègue, dans leurs locaux, en enchaînant les cafés. « Du coup : je vis La Courneuve depuis quarante ans mais à la base je suis une Ch’ti ! », reprenait Mimouna. « On vient d’Auby, tout près d’Hénin-Beaumont, tu sais, là où Marine Le Pen est élue députée. Mon frère est entraîneur de foot là-bas, mes sœurs y sont Atsem et femme de ménage. Je me souviens, quand j’étais petite, que les femmes, accompagnées des militants communistes, des profs, je me souviens de la prof d’anglais par exemple, allaient chercher leur mari à la sortie de l’usine ou de la mine quand ils recevaient la paye.
— Pourquoi ?
— Parce que le patron ava