« Bon ben voilà, je pense qu’on a fait le tour de l’ordre du jour et… — Euh… T’oublies pas quelque chose, là, Tristan ? » La réunion d’équipe se terminait, en ce lundi après-midi, et on sentait que le dirlo avait envie de retourner vite fait dans son bureau. Mais on n’allait pas le laisser filer comme ça. « Je crois pas, non. Tu penses à quoi, Magalie ? — Dolibarr. » Tristan a viré pâle : « Ah, Dolibarr, oui, mais non, c’est bon, tout est OK, y a plus qu’à… » Le temps a semblé se suspendre. Ça fait un moment, d’ailleurs, qu’il est suspendu : un an, qu’on nous promet la mise en place de cet outil, qu’on s’y forme à ce logiciel magique de gestion des abonnements, des ventes, des bases de données, des tarifs, bref, de toute la vie du canard, même que ça pourra nous faire la cuisine le midi, et puis la vaisselle, des mois que ça doit arriver « demain, c’est prêt, y a plus qu’à », mais toujours rien, toujours un truc qui bloque. Là, a priori, c’est des tests que doit encore faire Max, le développeur qui bosse sur le sujet. Et puis Max était malade, ou son ordi était pété, la semaine dernière. Tristan n’a pas pu finir sa phrase : Magalie et Pascale lui ont mis la tête sous l’eau. « Non mais tu sais que pendant ce temps, on continue à tout se taper à la main, sur tableurs Excel ? Des milliers et des milliers d’abonnés, de changements d’adresses, de relances ? Que nos bénévoles, on les bloque des après-midis entiers pour ça ? » Le dirlo, ça lui passe au-dessus de la tête, notre bazar, enfermé qu’il est dans son bureau du dernier étage, à réfléchir et à penser, pendant que ça trime, au rez-de-chaussée, dans les soutes fakiriennes. On s’est tournés