Youssouf, le grand petit poucet

Il était trop jeune pour être seul, Youssouf. Surtout au beau milieu de la mer…

Publié le 25 février 2025

« Ah bah oui, j’ai eu peur. Très peur, même. Je ne sais pas nager, moi. » Youssouf parle lentement, avec un phrasé un peu haché. Il jette un Å“il vers le ciel, à travers la vitre qui se couvre de buée. Je laisse tourner le moteur de ma bagnole, même à l’arrêt, sans quoi elle risque de ne pas redémarrer. J’avais vu débarquer Youssouf quelques semaines plus tôt, dans mon groupe d’entraînement. Immense, 1,95m je dirais, tout fin, une sauterelle on aurait dit. J’avais vite compris qu’il était migrant, qu’il avait traversé la Méditerranée, pas qu’il était aussi jeune : 16 ans, purée. Tous les parcours sont différents, parmi la cohorte de tous ces gamins venus frapper à la porte du club, depuis dix ans. Je voulais connaître le sien : je l’avais laissé prendre ses marques, écarter la timidité, retrouver confiance, avant de lui demander, de l’écouter se confier. Ce matin-là, en le ramenant à son foyer après l’entraînement, on discutait, donc. « Et donc tu viens du Mali, c’est ça ? — Oui, du Mali. — Pourquoi t’as voulu venir en France ? — J’ai pas voulu, j’ai pas choisi. J’ai grandi sans mon père, je ne l’ai pas connu. Et ma mère, elle est morte quand j’étais jeune. J’étais seul, alors mon oncle m’a élevé. Il s’est bien occupé de moi, mais il n’avait pas assez d’argent. Alors, un jour, il a dit qu’il allait m’envoyer à l’école en Mauritanie. — Tu étais d’accord ? — Oui, ça me plaisait, je voulais étudier. On a pris une voiture, on a roulé, longtemps. Il m’a présenté un homme que je ne connaissais pas. Et l’homme m’a dit de le suivre, il m’a amené jusqu’à une barque. Ça m’inquiétait. — C’était pas pour aller à l’école, a prioriâ€

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