Les vrais premiers de cordée

Chroniques sur corde, c’est un peu « l’ordinaire d’un ouvrier dans la France du début du XXIe siècle », nous dit Eric Louis. C’est ça : du malheur, c’est sûr, de la fierté, aussi, ne pas baisser les yeux, mais des moments marrants, malgré tout, au milieu.

Publié le 15 décembre 2019

Quand il est parti de Fakir, où il faisait à peu près tout ce qu’on ne faisait pas, nous autres bras cassés, notre copain Eric est devenu cordiste. Un de ces gars qui montent et descendent en rappel, dans les endroits inaccessibles, pour faire des boulots de nettoyage dangereux, risqués, dont personne d’autre ne veut. Mais Eric sait aussi écrire. Et vachement bien, en plus. C’est pas toujours drôle, son quotidien, loin s’en faut. Il raconte, notamment, comment ses collègues et lui ont perdu Quentin, enseveli sous des tonnes de résidu de sucre, à 19 ans le môme, mort au champ d’honneur de l’industrie, dans l’indifférence des médias, de la justice. Mais son dernier livre compte des moments drôles, grinçants, aussi, comme lorsqu’il arrête son camion près d'une maison de retraite, où il va passer quelques jours à poser des pics antipigeons. Eric se retrouve sur le toit mais sous la pluie, celle qui donne « des envies de suicide » et « des crèves carabinées ». Poser du produit répulsif toxique autour des fenêtres où les petits vieux s’obstinent, malgré les menaces de la direction de l’Ehpad, à nourrir les pigeons. Tout ça alors que Noël s’annonce… « Fin du premier jour. Mes collègues repartent dans la douceur de leurs foyers. J’habite à deux cent cinquante kilomètres. Je dormirai dans mon camion. Pressentant une envie difficile à réprimer, je reste un peu dans le coin. Afin de profiter des confortables toilett

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